Gilet fluo et sécurité routière, le grand n’importe quoi répressif ! Mais attention au contre argumentaire ...
Date de publication :
19 mai 2011 |
Mots clés :
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Date de publication :
19 mai 2011 |
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Cela fait longtemps que je n’ai pas écrit (Premier tour des cantonales), je n’avais pas le temps. Ce qui ne veut pas dire que je n’ai rien dit (Cf mon compte twitter).
Toutefois, l’actualité est chaude ! Ici, point de #bistougate, certains s’en occupent très bien, j’ai moi même dit quelques trucs, mais sans plus.
Nan, là, c’est de sécurité routière dont je vais parler, et plus particulièrement, celle touchant à la moto...
Chers lecteurs, vous n’êtes pas sans savoir que le Conseil Interministériel de la Sécurité Routière (CISR) a pris quelques décisions qui font réagir les citoyens. Et certains décisions sont liées directement aux motards, ces grands méchants délinquants criminels qui se tuent [1] :
Les plaques d’immatriculation pour les deux-roues motorisés seront de plus grande taille ;
Les conducteurs qui reprennent l’usage d’une moto après 5 années d’interruption devront désormais suivre une formation s’ils n’ont pas conduit de deux-roues motorisés au cours des cinq dernières années.
Les conducteurs de motos et de tricycles devront porter un équipement rétro-réfléchissant.
Pour le point 1, est ce utile de préciser que l’objectif est de rendre plus opérants les contrôles radars, et surtout les automatisés ? Pas besoin je pense. La plaque plus grande ne servira qu’à cela, sauf que les plaques sont normées et je ne sais pas si l’Europe sera de cet avis là. L’Europe sera peut être notre sauveur sur ce point.
Pour le deuxième point, je ne vois pas pourquoi. D’une part, c’est discriminatoire car le même dispositif n’existe pas pour les voitures, or, les risques sous entendus sont les mêmes. Et d’autre part, presque 100% des motards sont des automobilistes [2], l’inverse est loin d’être le cas, et donc la pratique de la route ne s’altère pas, puisque par ailleurs, le conducteur développe toujours son expérience.
Reste le dernier point... Celui qui fait couler beaucoup d’encre et agite énormément les motards. A juste titre ! En préalable, je précise que je suis [3] entièrement la position de la FFMC qui appelle les motards à "désobéir" en ne portant pas de "gilet jaune" car "Il ne nous protègera de rien"
Je ne porterai pas de gilet jaune ! Et je pense même que si les motards ont autant de courage que d’énergie dépensée en ce moment à hurler sur les forums et autres réseaux sociaux, je pense qu’il y aura beaucoup de verbalisations. Et j’appelle dès maintenant la FFMC à penser à collecter de l’argent pour la bataille. Je pense que le gilet fluo sera la nouvelle vignette moto [4] ! A l’époque, 8 motards sur 10 n’avaient pas payé la vignette, pourtant passer en loi. Mitterrand avait promis aux motards de la retirer si il était élu, elle l’a été, grâce à la mobilisation sans faille de la toute jeune FFMC. Tout simplement...
Je ne porterai pas de gilet jaune ! Pourquoi ? Je lis ici et là des arguments, mais ne nous trompons pas de contre arguments, au risque de ne pas convaincre l’opinion publique du bien fondé de notre combat ET SURTOUT de voir notre cause noyée dans le rouage de la mobilisation virtuelle [5] contre le retrait des panneaux de signalisation des radars et de l’interdiction des avertisseurs électroniques. Je parlerai de ce point là après.
Quelques arguments contre le gilet jaune lus ici et là : "c’est moche", "c’est comme l’étoile jaune", "c’est mauvais pour l’aérodynamisme", ... Mouais... Avec cela, clair, on va gagner...
Pour moi, il y a deux arguments à ne pas porter le gilet jaune :
1. Le fait de ne pas être vu est effectivement une cause importante dans l’accidentologie des motards. Mais entre le phare avant allumé, les éléments rétro-réfléchissants de nos blousons et casques, ce n’est pas nous qui ne sommes pas visibles, mais les automobilistes qui sont aveugles. Ou plus exactement, personne ne leur a appris à voir de petits éléments sur la route. Bien connu des pédagogues routiers, on sait que la vision n’est pas habituée à repérer des 2 roues (Vélos, cyclos, motos) dans la circulation, et donc le cerveau zappe l’information. Comme d’habitude, entre la solution d’éducation et la solution simpliste (De répression, car nous faire porter cela est représsif), les pouvoirs publics ont choisi celle la plus courtermiste et la plus basique. Mauvaise pioche ! Ce qu’il faut : intégrer une sensibilisation aux deux roues motorisés dans l’examen du permis B [6]. Indispensable ! Car n’oublions pas que les motards sont des automobilistes, l’inverse n’est pas vrai ! D’autant qu’un gilet ne nous protégera en rien en cas de chute !
2. Comme pour les feux de jour, c’est encore une fois la minorité vulnérable qui doit se protéger (SIC) contre la majorité. Càd, ce sont les vélos, cyclos, piétons, motards qui doivent faire en sorte que les autos ne les renversent pas. Qu’est ce que c’est que cette loi de la jungle dans laquelle le faible se cache du fort, alors qu’une civilisation doit permettre de faire cohabiter l’ensemble quelque soit sa vulnérabilité ? Dans ces cas là, remettons les enfants dans les mines de charbon ! Vous trouvez mon parallèle difficile ? Pourtant, j’ai tenu le même discours quand on a obligé les cyclistes à porter le gilet jaune ou encore quand certains départements ont obligé les enfants des transports scolaires à en porter aussi. C’est le monde à l’envers !
Sur facebook, on m’a envoyé une photo qui parle bien toute seule. On y voit d’un côté un motard avec les éléments obligatoires (et prévus) et de l’autre un motard protégé. Sauf que...
Sur la question des radars automatiques, et de l’annonce, appliquée déjà, de retrait des panneaux les indiquant, pour commencer, je dirais que je suis toujours hostiles aux radars automatiques.
D’une part parce qu’ils entrainent un traitement automatisé du constat de l’infraction [7], du traitement de l’infraction et du jugement [8]. D’autre part, parce qu’ils ne sont généralement pas placés à des endroits réellement accidentogènes, mais par contre bien rentables. D’autre part, là, c’est très personnel, je m’interroge toujours sur les signalements de sanctions. Orienté sur le versant pédagogique de la chose, on nous explique, et je veux bien le croire, que signaler les emplacements de radars atteint l’objectif de faire lever le pied dans certaines zones, soit disant accidentogènes. Soit. Si l’on considère que la zone est accidentogène, il est donc évident que ce n’est que la vitesse ! Or, comment le savoir vu que le précédent gouvernement (de droite) a supprimé tout simplement les fameuses enquêtes REAGIR [9]. Même si elles ont été remplacées par les ECPA, tous les acteurs citoyens de la sécurité routière savent qu’elles ont en fait été "reprises en main" par les pouvoirs publics, lassés de voir les orientations décidées en petit comité (soit disant) d’experts contredites par les enquêtes collectives et poussées des acteurs de terrain sur de vrais accidents.
Bref. Imaginez votre père, mère, patron, femme, mari ou je ne sais qui, vous dire "Attention, dans 2 mn, tu vas être sanctionné / baffé / engueulé /..." ! Est ce que vous changerez de comportement ? Oui, pendant 3 mn, ensuite, la vie reprendra son court. Pourtant, le risque est là. Celui de se faire flasher, certes, mais aussi, le vrai, celui que le radar devrait vous éviter car c’est-une-zone-accidentogène [10]... Et le fait de ne plus prévenir n’empêchera pas le risque... Il fera que vous vous ferez gauler, qu’éventuellement, vous ne recommencerez pas à cet endroit si vous y repassez + si vous le reconnaissez + si vous y pensez sur le moment + si vous avez le temps de changer sans faire prendre de risque aux autres votre vitesse ! Beaucoup de "si" ... Non ?
La suppression des panneaux et la mobilisation des vendeurs d’appareils de signalisation me laisse froid. Ne confondons pas "intérêt économique" et "sécurité routière" comme les pouvoirs publics le font actuellement ! Ces entreprises défendent leurs intérêts et non nos droits !
Si je roule vite et que la loi ne me l’autorise pas, je prend un risque de me faire gauler, j’assume. Si je ne veux pas prendre ce risque lié à la loi, je roule aux limitations. Et si je veux que cela change car la loi est débile, je vote, je me syndique, j’adhère aux associations de sécurité routière qui portent mon discours, etc etc etc. Mais je ne pigne pas qu’on me retire mon joujou qui de toute façon, pour être efficace, coutait cher et donc, instaurait une ségrégation économique entre les conducteurs. Là, tous égaux devant le radar automatique !
Je pourrais continuer pour aborder les probables conséquences de cette énième élévation de la répression routière de bas niveau, mais cela mériterait encore 3 ou 4 pages. Citons les fausses plaques, les permis suspendus, le développement des boites de récupération de points, le business des "tu conduisais à ma place car toi, tu as tous tes points", ...
Et n’oubliez pas de sortir vos motos le 18 juin pour aller botter le cul de Guéant et Sarkozy...
Pour finir, quelques arguments qui ne sont pas à moi, mais copier/coller d’un excellent blog, celui de Laurent Mucchielli, sociologue et pourfendeur des thèses sécuritaires. Extraits de l’article "Délinquance routière : les faux arguments du lobby répressif"
Rappelons quelques données de cadrage que chacun peut vérifier dans les bilans annuels :
depuis 2002 (et en particulier depuis la loi du 9 mars 2004), le code de la route a vu le nombre d’infractions prévues augmenter, leur qualification juridique et leur répression s’alourdir.
l’appareil répressif a connu en réalité une petite révolution au cours des années 2000 en se transformant pour gérer un véritable contentieux de masse. De 2002 à 2009, les infractions au code de la route sanctionnées par les policiers et les gendarmes sont passées grosso modo de 13 à 21 millions, soit une augmentation de plus de 60 %. Celles entraînant un retrait de points sont passées de 1,2 millions en 2002 à 5,9 millions en 2009, soit une augmentation de 390 %. Les infractions constatées les plus graves - les délits - sont passées de quelques 257 000 en 2002 à près de 562 000 en 2009, soit une augmentation de 120 %. A cela s’ajoute la révolution des radars. A titre indicatif, le centre de contrôle automatisé de Rennes a traité en 2009 17,5 millions d’infractions.
l’accentuation de la répression de la délinquance routière est l’une des principales causes de l’explosion des gardes à vue qui a obligé à la réforme récente que l’on sait.
l’émergence de la nouvelle délinquance routière fait que ce contentieux représente désormais plus d’un tiers de l’activité des tribunaux correctionnels (35 % des délits sanctionnés en 2009 ), ce qui en fait le type de délinquance le plus réprimé parmi tout ceux existant.Enfin, rappelons aussi que le coeur de ce contentieux de masse demeure l’excès de vitesse, que 70 % des infractions ayant entraîné des retraits de points sont des excès de moins de 20km/h et que les auteurs des infractions routières appartiennent aux deux sexes et sont de tous les âges. Pour simplifier, l’on a donc essentiellement affaire en réalité à une petite délinquance routière qui concerne non pas une minorité de dangereux chauffards alcooliques mais à l’évidence une partie beaucoup plus importante, plus « ordinaire » et peu dangereuse de la population française.
Merci
[1] Noter que ce sont les délinquants qui se tuent, joli paradoxe !
[2] Raisons de famille, de métier, ...
[3] Du verbe suivre
[5] Pour l’instant, elle n’est que dans la presse et sur internet
[6] Voiture
[7] Passer à 60 au lieu de 50 km/h devant le radar à 08h45 ou à 23:45 n’entraine pas le même risque accidentogène, et là, seul un représentant des forces de l’ordre pourra évaluer la dangerosité, et donc la tolérance possible, souplesse indispensable pour ne pas basculer dans le totalitarisme !
[8] Je vous renvoie aux tentatives plus ou moins fructueuses des avocats pour faire tomber l’absence de réels recours à la décision de la machine !
[9] les enquêtes REAGIR (Réagir pour les Enquêtes sur les Accidents Graves et les Initiatives pour y Remédier) créées en 1982 avaient comme finalité de mieux structurer l’action locale en matière de sécurité routière et de renforcer les partenariats avec les collectivités territoriales et la mobilisation des bénévoles.
[10] Suivez un peu !
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